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le 22 octobre 2020 à 10h30
Philippe Petit de Modulisme annoncait :
Good morning,
Today I am proud to offer a new feature with Jean-Marc Foussat who discovered the EMS Synthi AKS back in 1974 and has been perfecting his use of it ever since, improvising with Steve Lacy, Derek Bailey, (Steve & Derek I would have liked to but it didn't happen and Philippe got carried away) Evan Parker, Carlos Zingaro, Raymond Boni, Jac Berrocal, Jean-François Pauvros (with whom he had started Marteau Rouge from 1992 to the early 2000s.)… Self-published the « Abattage » LP in 1981 whose collage of musique concrète and furious Synthi sounds garnered a cult following over decades. Our session brings further the heritage/works from such a pioneer, respect !
Bonjour à tous,
Aujourd'hui, je suis fier de vous proposer un nouveau numéro avec Jean-Marc Foussat qui a découvert le Synthi AKS d'EMS en 1974 et s'en est perfectionné depuis, improvisant avec Steve Lacy, Derek Bailey, (Steve & Derek j’aurais bien voulu mais ça ne s’est pas présenté et Philippe s’est laissé emporter par son élan), Evan Parker, Carlos Zingaro, Raymond Boni, Jac Berrocal, Jean-François Pauvros (avec qui il a créé Marteau Rouge de 1992 au début des années 2000)... Il a auto-publié le LP " Abattage " en 1981, dont le collage de musique concrète et de sons Synthi furieux a suscité un culte pendant des décennies. Notre session met en valeur l'héritage/les œuvres d'un tel pionnier, respect !
En fait, il semblerait qu'il y ait eu un "bug", puisque modulisme n°31 ne se trouve pas à sa place, et qu'il apparait seulement ici.
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Je ne pense pas que ce soit l'odeur…
Pour commencer,
un petit texte en forme de panégyrique-being…
Jean-Marc Foussat est né en 1955 à Oran, en Algérie qui, à cette époque là était encore un peu française, mais plus pour très longtemps.
La radio et les disques ont nourri son enfance et il assemble grâce à une boîte « Petit Philips » sa première radio autours de ses 12 ans. Les Foussat s'installent en banlieue parisienne fin 1968 à leur retour d’Algérie. Grace à Rock’n Folk et Hara-Kiri Jean-Marc Foussat, découvre Soft Machine puis Gong, Sun Ra ou Franck Zappa… et monte ses premiers groupes dans lesquels les guitares électriques peuvent être fabriquées par ses soins. Il abuse du Uher Royal de Luxe de son père, tripote son premier TEAC 4 pistes, après avoir lu attentivement la psychoacoustique d’Émile Leipp et beaucoup écouté France Musique la nuit.
Finalement, vers 19 ans, avec un copain, il découvre le Synthi dans des disques tout d’abord puis physiquement dans le studio que louait Ahmed Essyad au Centre Américain Boulevard Raspail à Paris et tombe immédiatement sous le charme de l’AKS.
C’était un instrument sans passé, sans tradition ce qui ne pouvait que séduire un jeune adolescent qui rêvait encore de révolution. Ils vont donc en chercher un à Londres, et se mettent d’arrache-pied à vouloir en faire un instrument comme les autres, mais à leurs sauces. Peu de temps après il se procure un VCS3.
Deuils, disputes et séparations fragilisent le jeune homme qui bien qu’il continue de pratiquer assidument chez lui renonce à jouer en public pour un long temps.
Il ne rompt ce silence qu’avec le LP Abattage auto-publié en 1983, collage éclectique de musique concrète et de sons furieux de Synthi qui suscite encore un véritable culte aujourd’hui.
Il travaille quelques temps dans le studio de l’Oiseau Musicien de Jean-Claude Roché puis commence à enregistrer sérieusement la scène européenne de la « free music » en plein essor. Sa propre pratique de la musique reste un peu secrète, mais beaucoup des musiciens qu’il enregistre deviendront des amis puis de futurs complices de scène.
C'est avec Jean-François Pauvros à la guitare électrique et Makoto Sato à la batterie qu'il retrouve le jeu public avec Marteau Rouge, groupe qui jouera 25 ans. Marteau Rouge n'a jamais eu un grand succès commercial, mais il obtient une large reconnaissance de la part des musiciens et non des moindres.
Une amie de la fin du Lycée, Hélène Sage, qui l’avait déjà bien aidé à produire Abattage lui donne alors un vieil AKS dont elle ne s’était jamais vraiment servie.
Il joue un patch qui lui convient, celui qui s’est mis en place pour Abattage, qu’il ne modifie que peu car tel quel il peut obtenir tout ce qu’il a besoin d’entendre pour le moment. Il utilise aussi un Phase Frequency Shifter d’EMS pour « traiter » sa voix ou celles de ses comparses — gémissant crescendo, criant sur un déluge de phrases brisées par le KS… une banque de sons — maintenant dans un ordinateur après avoir longtemps été utilisée sous forme de cassettes — pour injecter dans sa musique des portions généreuses de sa vaste collection de sons récoltés un peu partout, de toutes natures et pouvant même friser la vulgarité, le tout, bien trempé dans un Roland Space-Echo modernisé par Boss, et mélangé dans une table de mixage généreuse.
La musique électronique en soi, avoue-t-il, n'a jamais été un de ses centres d'intérêt, car ce qu’il apprécie c’est la Musique et non ses manières définissantes.
Les synthétisistes qu'il cite régulièrement comme étant ses premiers "stimulants" sont Richard Teitelbaum et surtout John Snyder, qu'il a rencontrés très tôt grâce à Joe McPhee Mais ceux-ci ne l’intéressent que dans la mesure où ils ont trouvé avec leurs instruments le moyens de créer leur langage spécifique dans le domaine de l'improvisation libre.
Jean-Marc Foussat se définit avant tout comme un joueur de groupes. Depuis son retour à la musique en 1992, il lui a fallu 18 ans pour juger son propre jeu suffisamment satisfaisant et se mettre à donner des concerts en solo.
On pourrait/doit écrire beaucoup sur ses penchants/méthodes dadaïstes et surréalistes : associations libres et collages étranges, sa musique n'est qu'inspiration. La virtuosité ne l’intéresse pas. Comme l'auditeur peut le constater à partir de ces notes, Jean-Marc Foussat est un véritable autodidacte qui a appris la vie en discutant avec elle et les amis qu’il s’est choisi.
La théorie, dans un sens, n'explique donc pas sa musique.
La psychanalyse pourrait participer d’un meilleur cadre interprétatif mais non suffisant.
Parfois, un exorciste serait utile.
Méditerranéen aux manières douces et au grand cœur, il est derrière son Synthi un homme en roue tout à fait libre. Alors, il entre dans une transe — état à peine altéré, non induit par la drogue, l'alcool ou la cigarette depuis des décennies, (je suis heureux de pouvoir le dire) — profonde, parfois sombre, où sa musique solo trouve particulièrement son envol.
Cette session ne fait pas exception à la règle.
Julien Palomo
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Pourriez-vous, s'il vous plait, donner un résumé de vos activités musicales ?
Un peu comme une biographie musicale ?
Quand j’étais petit j’ai écrit des choses que je voulais poétiques et pour faire comme mes modèles j’ai voulu les chanter. J’ai tenté la guitare grâce à « la méthode à Dadi » mais je n’étais pas très très bon. J’ai tout de même persévéré.
La persévérance est avantageuse ai-je appris plus tard.
J’ai été à des concerts
J’ai écouté beaucoup de musiques que je consultais surtout dans les bibliothèques et que je copiais scrupuleusement sur les bandes magnétiques du magnétophone de mon père.
J’ai fabriqué deux basses et une guitare.
Et puis, grâce à une conjonction de circonstances un peu exceptionnelles, j’ai rencontré le Synthi AKS et j’ai dérivé.
J’ai mis un peu de temps avant de « comprendre » à ma manière ce qu’il était envisageable que je fasse avec cet instrument.
Je l’aime bien.
Sur quoi avez-vous travaillé récemment et avez vous des sorties ou des performances à venir ?
Je devais avoir quelques dates autour de SonicProtest qui ont été un peu perturbées par l’épisode du virus ridicule. Depuis je suis sensé confiner comme tout le monde. Cependant après un peu plus d’une année de silence ma maison de disques, Fou Records, s’apprête à éditer un double CD de l’intégralité du concert : première partie solo et seconde partie trio, joué en Janvier au Café OTO à Londres avec Daunik Lazro (qui, très généreusement, m’aide à le produire) et Evan Parker.
Aussi, dès que possible, je souhaiterai aller aux États Unis y faire le grand tour que je n’ai encore jamais osé faire.
Comment avez-vous découvert les synthétiseurs modulaires la première fois ?
Avec un copain, on a écouté Agitation Free : Malesh, entendu de l’inouï et cherché au dos de la pochette ce que c’était. AKS ou VCS3 (je ne m’en souviens plus très bien mais...) c’était l’un des deux. La publicité EMS dans Rock n’ Folk nous a aiguillé vers cette chose. Mon copain a trouvé au centre américain un « studio » où il était possible d’en toucher un pour une somme sans doute très modique. On y est allé.
Quand est-ce arrivé ?
Quand avez-vous acheté votre premier système ?
On a donc touché et heureusement qu’il y en avait un, car on l’a ouvert et appris avec, le mode d’emploi. C’était en 1973/1974 sans doute.
Après ? Ça nous a vraiment plu et, comme mon camarade avait un peu de « moyens », on est parti tous les deux en chercher un à Londres par le train… Rock n’ Folk avait fourni l’adresse. Puis on est allé aux économats de l’armée américaine en Allemagne acheter un ampli Revox et on a aussi investi dans des enceintes KEF en kit... (encore ailleurs et...) surtout parce que « Que Choisir » balbutiant l’avait dit !
Quel a été l'effet de cette découverte sur votre processus de composition ?
Sur votre existence ?
Petit à petit j’ai laissé tomber la guitare.
En 81 un peu par hasard encore j’ai enregistré une séquence avec un patch de rêve et ça a fait « Abattage ».
Mais j’ai encore mis dix ans au moins avant de comprendre que composer était une idiotie en ce qui me concerne et qu’il valait bien mieux que je me fie à ce que le Synthi me donnait plutôt que de vouloir lui faire faire des choses impossibles qui ne lui convenait pas.
Assez souvent les modularistes en ont besoin de plus, leur soif de nouveaux modules n'est jamais satisfaite ?
Comment expliquez-vous cela ?
Ou, au contraire, êtes-vous fidèle à un instrument ?
Sans doute un surgeon d’Avoir qui passe par là. Personnellement je m’en fous. Je n’ai jamais touché d’autre Synthétiseur que l’AKS ou le VCS3 qui me satisfont chacun à sa manière (quasi identique) et parfaitement.
Pouvez-vous décrire le système que vous avez utilisé pour créer la musique pour nous ?
Pouvez-vous décrire comment vous avec corrigé et réalisé votre session Modulisme ?
Il y a deux pièces qui ont été très émotionnellement différentes à jouer.
La première par ordre d’ancienneté, L'inattendu, a été jouée à Rennes dans un petit festival adorable l’été dernier. Ça a été un moment d’émotion rare, très important pour moi — pour tout un tas de raisons trop complexes et intimes à dire ici — et c’est entre autre pour ces raisons qui pour moi sont présentes dans la musique et que j’entends toujours finalement, que je l’ai choisi.
L’autre, extrêmement récente fait partie de mes gammes que je souhaiterais quotidiennes mais qui ne sont que bi ou tri hebdomadaires seulement. On n’a que deux mains et un seul cerveau et plus ça avance en âge, plus il y a de « choses » à faire avant la fin.
même dans les deux cas : de gauche à droite :
— Synthy AKS d'EMS
— Banque de sons « Ableton Live »
— SE-50 Boss
— Space Echo Boss
— Table de mixage 2442 de Behringer
— Phase Frequency Shifter d’EMS
— Appeaux, guimbardes et jouets divers
Dans la seconde pièce, jouée chez moi au Thoronet, on peut entendre que je commence à renouer avec mon piano, un Pleyel 1930 qui a appartenu à ma Grand-Mère paternelle et que j’ai sauvé d’une mort certaine en le faisant remettre à neuf avec toutes mes économies de l’époque, en 1977...
....
Quel serait le système dont vous rêvez ?
Je n'ai jamais rêvé, de ce genre de chose ! Sauf peut-être à l’époque où j’ai acheté mon VCS3 mais c’est tellement vieux que je ne m’en souviens plus.
Vous sentez-vous proches de certains autres modularistes contemporains ?
Lesquels ?
Quels pionniers du modularisme vous ont influencé et pourquoi ?
Là Il est un peu emmerdant pour moi de répondre à cette question parce que malheureusement je crains fort de faire partie des gens qui peuvent peut-être influencer mais moi j’ai pas pu être influencé par ce que ça n’existait pas vraiment avant...
Donc la question ne se pose pas vraiment.
J’ai un peu de mal à trouver des gens avec qui je m’entende bien parce que en fait à mon avis ce qui compte ça n’est pas l’instrument c’est un je sais pas très bien ce que c’est. L’instrument n’est jamais qu’une chose un moyen et ce qui m’intéresse c’est plus ce qu’on a l’intention de faire et ce qu’on fait avec.
De plus en plus mon intention c’est bêtement de faire de la musique.
J’aime bien jouer avec Thomas Lehn. On s’entend plutôt bien parce que nous ne nous jugeons pas du tout et que nous faisons avec le même outil des choses qui sont radicalement differentes. Ce synthétiseur a cela de très particulier que justement il n’y a pas vraiment de modèle en ce qui le concerne.
Moi, j’en ai fait ce que j’ai pu.
Quand je l’ai rencontré c’était un instrument tout neuf qui n’avait pas de passé et c’est justement pour ça qu’avec mon copain nous avons voulu aller vers lui .
Nous sommes allés vers un instrument dont on pouvait imaginer inventer l’usage. À notre guise, à notre manière.
Avant, l’autre instrument que j’aurai voulu « apprendre » c’était le piano, mais j’avais 7/8 ans quand l’occasion s’est présentée et la méthode rose m’en a gravement dégoûté !
Maintenant je sais qu’on doit apprendre, puis digérer et oublier ce qu’on a appris... pour faire de toute chose ce que l’on doit en faire. Et surtout pas de se laisser tenter par des modèles. Là j’ai eu un peu de chance, il n’y en avait pas !
Ouf !
Un conseil que vous pourriez partager avec ceux qui souhaitent démarrer ou développer leur « Modulisme » ?
Rester simple et soi-même semble à la fois facile et impossible donc c’est là dans ce nœud là qu’on doit chercher et défaire ce nœud n’a rien à voir avec un instrument ou un autre... tout est plutôt dans la tête, la nôtre à chacun, et ce que nous demande l’instrument est de l’accompagner plutôt que de vouloir faire les kakous à lui imposer ce que nous ne savons pas !
Le modulisme, le vrai, se situe dans les méandres des circonvolutions de notre cervelle...
Et hop, pour terminer voilà comme une petite réminiscence de cadeaux Bonux :
Il y en a qui enlèvent leur chapeau ou Les vallées sans doute, parce qu'elles peuvent se remplir.